Si je devais résumer cet article ainsi que mon opinion sur tout ce qui peut faire controverse dans le monde équestre aujourd’hui, je dirais simplement que les opinions extrèmes et radicales causent toujours du tort aux chevaux. La clé c’est l’équilibre dans tout.
Si je ne m’étais jamais exprimée sur ce sujet auparavant, c’est simplement parce que beaucoup d’autres l’ont fait avant moi avec brio. J’ajoute donc ma pierre à l’édifice après qu’on m’ait demandé mon avis à ce sujet.
Le constat de l’intolérance
L’autre jour, je voyais un post sur facebook et ça m’a pas tout à fait choqué mais presque…
C’était sur un groupe facebook et cette personne avait mis un post qui disait en gros qu’elle ne voulait discuter qu’avec des gens qui respectent vraiment le bien-être de leur cheval, en précisant que cela comprenait « bien sûr » (comme si c’était évident pour elle) la monte sans mors et d’avoir un cheval pied nu.
Le message est très clair, toute personne utilisant un mors et des fers ne peut pas respecter le bien-être de son cheval.
Tout à coup j’ai eu l’impression de venir tout droit du pays des bisounours et de découvrir brusquement la dure et triste, et effrayante réalitée…
Je n’ai aucune idée de combien de spécimens ils sont mais ce type de jugement est tellement intolérant et irrespectueux pour les autres que je vous souhaite de ne pas en faire partie.
Vous, moi, eux, nous aimons tous les chevaux, c’est une évidence.
Sinon pourquoi dépensons-nous autant d’énergie, de temps et d’argent pour eux ?
Nous faisons tous de notre mieux pour qu’ils soient bien et pour leur offrir ce qu’il y a de mieux avec nos moyens, nos connaissances, nos opinions et nos expériences.
Tout le monde est persuadé de faire le maximum pour que leur cheval soit bien.
Cette histoire peut sembler caricaturale mais nous sommes tous confrontés un jour ou l’autre à l’intolérance et parfois, c’est nous qui sommes intolérant…
Avec ou sans fer ?
J’aimerais vous raconter une expérience que j’ai vécu et qui a définitivement déterminé mon opinion sur le pied nu.
Il y a quelques années, j’ai fait un court séjour dans une petite pension pour chevaux dont la propriétaire était très tournée vers l’équitation éthologique, sans mors, pieds nus et soins au naturel.
Dès leur arrivée chez elle, tous les chevaux sont systématiquement déferrés et passés pieds nus.
Ce qui était malheureux c’est que ça faisait presque une année que cette dizaine de chevaux étaient arrivés là et certains d’entre eux ne se remettaient pas de cette transition pied nu. Abcès de pied à répétition et boiterie mystérieuse quasi permanente dont elle ne comprenait vraiment pas l’origine.
Je ne veux pas dénigrer son travail parce qu’elle faisait vraiment ce qu’elle pensait être le mieux pour eux.
Ce que j’ai observé de façon évidente c’est que certains chevaux, en général ceux qui avaient eu une carrière sportive et des fers, ne pouvaient pas s’adapter à cette transition.
Par rapport à la ferrure encore, il est intéressant aussi de rappeler que tous les chevaux n’ont pas des aplombs et un déroulé du pied parfait ce qui implique une ferrure adaptée pour éviter des répercussions sur les articulations supérieures, les tendons et les ligaments qui provoqueraient une usure prématurée et des douleurs même si le cheval n’est jamais monté.
Cette superbe vidéo vous donne un aperçu des contraintes des articulations inférieures du cheval dans le sport et vous pourrez comprendre l’importance d’une ferrure adaptée dans certains cas.
Pour conclure, le choix de ferrer ou pas un cheval est une décision qui doit être prise en fonction des réalités anatomiques du cheval et pas en fonction de vos propres convictions.
Avec ou sans mors ?
Quand j’étais adolescente déjà, en observant les reprises à poney je m’étais déjà fait cette réflexion bien avant la création de ce débat.
J’observais les gamins en train de tirer sur la bouche des poneys qui du coup, ouvraient grand la bouche sans pour autant s’arrêter vraiment. Et à ce moment là je me suis demandée pourquoi personne n’avait jamais pensé à faire monter les cavaliers débutants en licol.
Autre centre équestre, autres enfants, autres shetlands et là pas d’enfants qui tirent et pas de bouches grandes ouvertes…
C’est là que je me suis rendue compte que la manière d’enseigner l’équitation y était pour beaucoup, oui même avec les enfants à shetland. Si personne ne leur dit que ça fait mal à la bouche du poney de tirer trop fort sur les rênes, ils ne peuvent pas le deviner. Mais quand on prend le temps de leurs expliquer les choses, on s’aperçoit qu’ils sont de très bonne volonté et que le respect de l’animal est une valeur importante que l’enseignant doit leur inculquer au plus tôt.
Plus tard, en améliorant mon niveau équestre et surtout en commençant à m’intéresser à l’équitation française j’ai découvert la décontraction de la mâchoire et les flexions qui ont l’avantage de faire comprendre au cheval la signification du mors. Plus personne n’enseigne ça et on s’étonne d’avoir des chevaux qui s’appuient, qui ouvrent la bouche et qui sortent la langue !
Par ignorance pure la décontraction de mâchoire à été remplacée par des muserolles et des nosebands.
Et toujours par ignorance pour certains, par effet de mode pour beaucoup d’autres, on s’est mis à penser que si le cheval se contracte sur le mors c’est qu’il ne le supporte pas et qu’il sera forcément mieux sans. Puis on s’est dit que finalement n’importe quel cheval serait forcément mieux sans mors.
Finalement le sans mors est arrivé pour combler le mauvais usage qui en a été fait par le passé, les déficits dans l’enseignement de l’équitation et notamment l’absence des flexions et de la décontraction de mâchoire dans cet enseignement qui auraient pu sensibiliser à la puissance de cet outil.
Je ne suis ni pour ni contre, mais je pense que trop souvent des cavaliers utilisent une bride sans mors sans vraiment remettre en question leur propre pratique équestre, ce qui revient à déplacer le problème (ou la douleur) sur le chanfrein.
Il y a ces quelques mots que je répète souvent :
« Ce n’est pas l’outil que vous choisissez qui est important, c’est la manière dont vous vous en servez ».
Et si vraiment, le sans mors est pour vous un objectif, une envie ou un passage pour aller vers la monte en cordelette puis en liberté alors il n’y a pas de problèmes.
Mais le sans-mors ne doit pas être un prétexte, une excuse ou une façon de résoudre un problème que vous rencontrez avec la bouche de votre cheval. Tout comme changer de mors ne vous aideras pas non plus.
Commencez d’abord par changer votre main et votre équitation avant de vouloir changer vos outils.
Pour conclure cet article, au-delà du fait que le mors soit plus précis que le licol ou le side-pull, que le cheval soit aussi sensible sur le chanfrein que dans sa bouche, que la transition de l’un à l’autre nécessite souvent un apprentissage pour le cheval. Ce qu’il faut vraiment savoir c’est pourquoi vous choisissez cet outil ?
Encore une fois, on ne change pas de mors parce qu’on rencontre un problème avec la bouche de son cheval tout comme on ne passe pas au sans-mors parce qu’on rencontre un problème avec la bouche. Il faut une réflexion objective sur le problème et commencer d’abord par chercher ce que vous pouvez changer chez vous, dans votre équitation, dans votre position et dans vos aides pour résoudre ce problème. Sinon vous ne faites que de le contourner et bien souvent ça ne résout absolument rien.
Tout comme l’effet de mode a poussé beaucoup de cavaliers à choisir de monter sans mors. Il serait néfaste pour le cheval qu’il en soit de même pour la ferrure.
Effectivement, certains équidés n’ont pas besoins de ferrure mais ce n’est pas le cas de tous et il faudra tenir compte à la fois des réalités anatomiques du cheval et de son passé. Une transition vers le pied nu pour un cheval qui a presque toujours été ferré entraînera forcément une période de transition douloureuse pour lui.
Le pieds nu n’est pas un choix éthique tout comme ce n’est pas non plus un idéal à atteindre avec tous les chevaux.
S’il faut ferrer un cheval jusqu’à la fin de sa vie pour lui éviter de quelconques souffrances dues à un mauvais aplomb ou à une transition qui se passerait forcément dans la souffrance, alors ça vaut le coup de continuer à ferrer. Et c’est ça, respecter le bien-être de son cheval.
MES CONSEILS POUR TRAVAILLER VOTRE CHEVAL tout en respectant son bien-être
Les grands principes à respecter pour pratiquer une équitation plus agréable pour votre cheval et plus confortable et pourquoi le avec ou sans mors n’est pas un débat.
Tous ceux qui y ont goûtés sont devenus accrocs à ces sensations…
6 Responses
bonjour Alexandrine,
encore un bon article réfléchi de ta part;
mes juments sont pieds nu car j’ai du apprendre à parer pour ma première qui est une jument lourde ( les maréchaux évitent surtout s’ils ont du boulot), du coup pour l’autre je la laisse pieds nu et je n’ai aucun problème sauf de sensibilité en balade sur certains chemins du coup je les laisse choisir leur trajectoire ou je mets des hipposandales;
et je les monte sans mors en balade , mais avec un mors en reprise;
ma seconde jument ne me laissait pas trop toucher le tête ( passé compliqué), alors je l’ai montée sans mors au début et une fois le dentiste , les douleurs et l’appréhension passées; je lui ai mis un mors;,
pour moi l’important c’est d’écouter le cheval, de lui offrir une ferrure adaptée si besoin, pour le mors c’est le seul outil précis que je connaisse mais il en faut un adapté à la bouche;
Ecoutons et tolérons c’est un bon moyen d’avancer!
Merci pour cet article ! Je m’y retrouve beaucoup.
Mon cheval est pieds nus, il a été brièvement ferré quand je l’ai acheté, puis passé pieds nus car mal ferré.. Depuis je n’y touche pas ; on fait de toute manière que du bac à sable et il ne semble pas gêné. Par contre je songe à le faire ferrer si on envisage une rando par exemple.
C’est exaspérant ces extrêmes.
Je monte en western, alors nous, les mors, bon… ça a mauvaise réputation. Pourtant la plupart des westerneurs ne touchent pas à la bouche de leurs chevaux comme on peut le voir chez certains en classique. Ce qui me fait tiquer, ce sont souvent ceux qui sont pro-sans mors, et qui en fait, montent en licol « éthologique » (je déteste ce mot), en tirant dessus comme si c’était un mors. Ça sert à rien, c’est un non-sens sidéral…
Je pense qu’il faut un juste milieu, et surtout savoir effectivement se demander si ce qu’on fait est vraiment le mieux ou non pour son cheval.
Pouvez vous s’il vous plait décrire précisément comment faire l’exercice de décontraction de la machoire? On ne voit pas dans la vidéo que vous recommandez, et je n’ai rien trouvé de bien précis sur le sujet.
Bonjour Florence,
Avez-vous lu l’article correspondant ainsi que les commentaires ? Tout y est expliqué
https://eduquer-son-cheval.com/la-decontraction-de-la-machoire/
Bonjour,
Tout à fait d’accords avec cet article.
La possibilité de laisser les pieds nus dépend aussi de la dureté de la corne, du travail du cheval (difficilement envisageable par exemple pour une longue distance en endurance !)et du terrain (caillouteux). Mon cheval retraité a bien supporté la mise au pieds nus car il n’est plus monté. J’ai même de la chance, car il y a une usure naturelle et n’a donc jamais besoin d’ être paré !
Pour le mors, c’est à mon avis une sécurité si le cheval embarque ( même si on peut aussi se faire embarquer malgré le mors) . En fait, il vaut mieux avoir un mors si son cheval n’ est pas parfaitement à l’écoute . Le rêve de galoper sur une plage sans selle, sans mors et pieds nus n’est pas à la portée de tout le monde….
Bonjour Alexandrine, mon cheval est pieds nus et monté avec un mors (sans muserolle) et s’en porte très bien. Concernant le pied nu, il est essentiel d’avoir quelqu’un qui sait parer pour cet usage, à savoir conserver suffisamment de sole. Sinon aïe ouille ça fait mal aux pieds.