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L’outil ne fait pas le moine

Avec l’émergence de nouvelles formes d’équitation, on distingue l’envie d’aller davantage vers le naturel. L’envie de tout retirer pour mieux vivre sa relation avec le cheval. De nouveaux outils de travail ont fait leur apparition et avec eux quelques personnes extrémistes rejetant alors complètement l’usage du mors notamment.

Et même au-delà des outils, du débat avec ou sans mors, c’est la même chose pour le choix d’une méthode. Souvent ce qui est nouveau et paraît plus naturel et proche des besoins du cheval attire et pourtant même dans ces courants il y a des pratiques condamnables.

Si certains utilisent mal une méthode là où d’autres parviennent à des résultats remarquables avec la même chose, est-ce que ça veut dire que la méthode est mauvaise et condamnable ? Est-ce que ça veut dire que les résultats remarquables ont forcément été obtenus dans la contrainte et la douleur ? Non parce qu’il y a le facteur humain qui va incarner différemment une même méthode.

En partant de ce constat, on peut dire que l’outil ou la méthode ne fait pas le moine. On ne peut donc pas les juger en tant que tel, la seule chose que l’on peut juger c’est l’usage qui en a été fait.

Monter avec un mors c’est mal ?

Il suffit de fréquenter un peu les réseaux sociaux pour se rendre compte rapidement que tout ce qui est susceptible d’amener une contrainte sur le cheval est plus ou moins diabolisé.

L’argument le plus courant au sujet du mors étant la douleur qu’il inflige à la bouche du cheval. Et je comprends cet argument quand on voit parfois à quel point il peut être mal utilisé et provoquer des réactions de douleurs et de vives défenses chez les chevaux.

Mais peut-on vraiment être certain que les brides sans mors sont vraiment moins douloureuses pour lui ?
Que disent les études scientifiques à ce sujet ?

Une étude a été réalisée pour tenter de déterminer quelle pression est la plus inconfortable pour le cheval entre celle du mors et celle de différentes ennasures. Ils ont comparé un mors simple brisure, un side-pull, LG zaum, la bride sans mors du Dr Cook et le Fred Rai rope.

Ils ont ensuite équipé les rênes d’un moyen de mesure de la tension et les ont fixés de façon à permettre au cheval d’incliner sa tête vers le bas de 5 à 10° pas plus.

Les chevaux ont ensuite été stimulés avec un seau de nourriture pour les encourager à exercer une tension sur les rênes. Le test prend fin lorsque le cheval cesse de chercher à atteindre la nourriture en refusant d’exercer de la tension sur les rênes. Ce processus a été réalisé 3 fois par jour pendant 3 jours pour chaque cheval.

Les résultats ont montré que le cheval applique la même tension sur les rênes quelque soit le système utilisé sauf pour le side-pull où il applique légèrement moins de pression. Il a aussi été montré que les chevaux lourds et les poneys n’hésitaient pas à s’infliger davantage de tension sur les rênes que les chevaux avec plus de sang.

Donc avec ou sans mors, le cheval a globalement le même ressenti pour la tension de rênes qui s’exerce sur lui y compris avec un mors sauf pour le side-pull qui semble être plus dissuasif.

Sources : https://thehorse.com/158707/study-bitted-bitless-bridles-apply-similar-pressure-to-horses/
https://www.horseandhound.co.uk/news/bitless-bridles-compared-to-traditional-snaffle-bridles-study-641821

Dans le soucis du bien-être du cheval on a remplacé les mors, trop souvent mal choisi et finalement mal utilisés par d’autres systèmes sans mors sans se demander si ces outils là étaient réellement plus doux et moins douloureux pour le cheval.

En fait on a déplacé le problème vers des outils différents en se disant que puisque ce n’est pas dans la bouche c’est forcément mieux sans penser que mal utiliser les mains à cheval causera autant de douleur que ce soit avec ou sans mors, que ce soit dans la bouche ou sur le nez. Et il s’avère qu’aucun des deux n’est véritablement meilleur pour le cheval.

Aller soigner la cause plutôt que la conséquence

Si changer d’outil pour soulager le cheval de la douleur du mors n’est pas la meilleure solution, il y en a une autre qui a l’avantage de vous permettre, au-delà de l’outil que vous choisirez (puisqu’ils se valent presque tous) d’infliger moins de douleur au cheval et surtout de rendre la communication avec lui plus facile.

Il s’agit de comprendre que c’est bien l’usage que vous faites de vos mains qui cause de la douleur et pas nécessairement l’outil que vous utilisez. Ça ne veut pas dire que ce que vous mettez actuellement sur la tête de votre cheval est le plus adapté pour lui. Mais si déjà, vous avez conscience de ça, vous comprendrez qu’il est inutile de chercher la solution aux défenses que vous rencontrez en allant chercher un outil magique qui va faire la différence.

A partir de là, vous pourrez vous concentrer sur la seule chose qui puisse vous apporter de grands bénéfices durablement dans votre équitation, c’est-à-dire vous-même.

En utilisant mieux vos mains, vous causerez moins de dégâts dans la bouche de votre cheval donc vous cesserez aussi de provoquer toutes ces défenses et ces résistances chez votre cheval. S’il y a moins de défenses, votre cheval a plus de chances de se décontracter davantage et de mieux exécuter les exercices que vous lui demander. Et si les exercices que vous lui proposez se réalisent sans résistances et dans la décontraction ce sera forcément bénéfique pour la santé de votre cheval et pour son moral. Vous aurez moins besoin de l’ostéopathe et moins de risques aussi d’en arriver jusqu’aux lésions et pathologies locomotrices.

Respecter le bien-être de son cheval n’a donc pas grand chose à voir avec les outils que vous utilisez.

Ici j’ai pris l’exemple du mors car c’est le sujet le plus évident et le plus actuel mais on pourrait certainement arriver aux mêmes conclusions si l’on faisait le parallèle entre d’autres outils ou méthodes.

Déjà parce que si vous utilisez tel ou tel outil actuellement c’est parce que vous êtes persuadé que c’est le plus adapté. Ensuite parce qu’aucun cavalier ne souhaite consciemment faire du mal à son cheval en choisissant volontairement quelque chose de douloureux, ou alors il y a une autre raison derrière tout ça qui peut être par exemple la sécurité.

Donc la meilleure chose à faire, n’est pas de vous concentrer sur la recherche du prochain outil qui va vous aider à régler vos soucis.

Votre plus grande préoccupation devrait être de chercher à vous perfectionner sans cesse, à mieux comprendre pourquoi vous avez des défenses, des résistances ou pourquoi vous manquez de contrôle.

A tester différentes manières d’employer vos aides pour trouver ce qui va le mieux convenir à votre cheval et éviter les défenses en changeant un à un les différents paramètres qui la composent plutôt que de vous entêter à tirer sur les rênes parce qu’on vous a dit que c’est comme ça qu’il fallait faire.

A travailler sur des exercices cohérents susceptibles de sensibiliser votre cheval à vos aides afin qu’il y réponde mieux et tout le temps. Souvent le manque de contrôle est directement lié soit à un manque d’éducation du cheval soit à un manque d’équilibre.

Le plus grand mal en équitation est l’ignorance donc formez-vous

Si vous vous concentrez toujours à chercher la cause plutôt qu’à essayer de soigner ses conséquences, même sans coach et même sans changer d’outils vous allez progresser. La bonne nouvelle c’est que les progrès, une fois que vous les avez, ils ne peuvent plus jamais vous quitter et s’appliqueront à tous les chevaux que vous aurez l’occasion de monter. Si l’on devait résumer en une phrase : dépensez votre argent pour améliorer vos compétences et pas pour améliorer votre équipement.

Outils différents pour objectifs différents

Quels sont vos objectifs avec votre cheval ? Que souhaitez-vous atteindre à longe terme ?

Selon ce que vous allez répondre à ces questions et la façon dont vous souhaitez atteindre vos objectifs, vous n’aurez pas les mêmes préoccupations et vous ne choisirez pas les mêmes outils que ce soit au niveau matériel ou méthodologie.

Si pour certains, le relationnel est au premier plan, alors ce qui compte c’est d’éprouver un plaisir partagé à faire des choses ensemble avec votre cheval et surtout à la manière dont vous le ferez. Il y a beaucoup de méthodes et d’approches possibles pour répondre à ce besoin.

L’avantage de toute cette variété c’est qu’elle permet de répondre à la sensibilité de chacun de l’équitation éthologique dont le mot d’ordre est d’éduquer le cheval en codifiant beaucoup de gestes pour le rendre plus pratique pour nous à l’approche Intrinzen qui au contraire ne veut rien imposer directement au cheval mais seulement lui laisser proposer en passant par le clicker training qui me semble être un peu à mi-chemin.

Pour d’autres, c’est la performance qui est la plus importante et il n’y a rien de mal à ça car c’est quelque chose qui demande aussi beaucoup de rigueur, d’exigence et de persévérance dans bien des aspects. Il faut savoir gérer le physique et le mental des deux athlètes ce qui demande de grandes qualités d’observation et des connaissances approfondies. Le perfectionnement des deux athlètes réclame lui aussi toujours plus de finesse, de précision et beaucoup de répétition. C’est un travail bien différent mais tout aussi gratifiant.

Il est important de préciser je pense, qu’on ne peut pas nécessairement opposer relation et performances car dans la performance, la relation qui s’établit doit être aussi très forte et très puissante même si elle est moins spectaculaire. C’est essentiel pour avoir un cheval qui garde le moral malgré les contraintes d’une activité physique intensive et qu’il continue de vous faire confiance en toutes circonstances. Je pense d’ailleurs que c’est quelque chose qui pourrait être davantage exploité dans le milieu des courses hippiques. Finalement le dosage que vous choisirez entre relation et performance se fait ensuite selon vos envies et votre sensibilité.

Aussi, le choix d’un outil est avant tout quelque chose de personnel voire d’intime et qui reflète ce dont le cavalier a vraiment envie avec son cheval et vers quoi il veut aller. Ce choix se fait aussi par rapport à vos principes et aux expériences que vous avez pu avoir de façon personnelle ou acquise au travers l’expérience d’autres professionnels. Si on vous a dit qu’il était bon d’utiliser un enrênement ou pas, ou si vous avez étudié le sujet pour vous former votre propre opinion.

Il y a des chances que vous n’utilisiez pas les mêmes techniques ni les mêmes outils toute votre vie parce que vous serez amené à évoluer avec l’expérience et avec l’âge. Vos envies, vos besoins et vos priorités peuvent changer du tout au tout en quelques années. Alors c’est important de régulièrement vous poser ces quelques questions afin d’être toujours sûr d’être le plus épanoui possible dans votre pratique équestre.

Quel est votre grand rêve équestre ? Quel moyens vous donnez-vous pour l’atteindre avec votre cheval ?

Ne plus juger les autres pour leurs choix

Les réseaux sociaux nous le montrent bien par les conflits qui se créent sur différents sujets, et en général toujours les mêmes sujets. C’est un fait, nous ne pouvons nous empêcher de nous juger les uns les autres en comparant les outils, les pratiques, les méthodes comme pour se donner bonne conscience sur le fait que la notre est forcément la meilleure.

Mais la vérité n’est jamais ni noire ni blanche, il y a toujours des nuances.

Chaque fois que vous jugez quelqu’un, rappelez-vous que vous ne connaissez certainement pas du tout cette personne. C’est comme juger quelqu’un que vous voyez dans la rue, c’est comme se dire qu’un criminel n’a pas la tête de l’emploi.

Chaque fois que vous jugez, vous oubliez que vous ne connaissez pas ses priorités, ses croyances, ses rêves, ses expériences, ce qu’on lui a appris et dans quel contexte il évolue. Comme vous n’êtes pas à sa place, c’est normal que vos points de vue ne soit pas nécessairement les mêmes. Et si ça se trouve, si vous étiez à sa place, avec sa personnalité, ses croyances et ses souvenirs, vous feriez exactement la même chose que lui.

Les opinions et les choix sont subjectifs, nous tentons tous de faire les meilleurs choix possible de notre point de vue. Juger les autres c’est finalement une manière pour certains de se rassurer et de se donner bonne conscience en recevant l’approbation des autres. C’est aussi pour ça, que plus une personne a une opinion différente d’un groupe tout en étant absolument minoritaire voire la seule, au plus elle sera rejetée violemment par l’intégralité du groupe. C’est un comportement qui renforce la cohésion, la vision et les liens entre les personnes qui rejettent la personne qui a eu le malheur d’exprimer une opinion différente et d’une certaine manière, ça galvanise les rangs et stimule la communauté.

C’est triste mais c’est comme ça… Oui nous sommes des animaux après tout…

L’erreur là-dedans c’est de vouloir convaincre les autres que notre opinion est la meilleure ce qui créée une sorte d’aversion chez l’autre qui n’a aucune envie d’être convaincu que son opinion n’est pas la bonne. La meilleure façon de convaincre quelqu’un n’est pas de l’agresser, de le dénigrer ni même d’argumenter, c’est plutôt de l’inspirer par ce que vous faites et les résultats que vous avez réussi à obtenir. Vous attirerez alors à vous des personnes qui ont envie de vous ressembler et qui adhèrent déjà à vos valeurs.

Donc porter un jugement sur les choix en termes d’outils et de méthodologie, c’est porter un jugement sur les envies et sur la manière dont cette personne a choisi d’y parvenir. Il faut bien prendre en compte qu’en général, si cette personne décide de faire ces choix c’est certainement pour une bonne raison et souvent, elle est persuadé d’avoir fait le meilleur choix compte tenu de ses connaissances et compétences actuelles.

C’est possible aussi qu’elle ne l’ait pas choisi consciemment. Dans certains cas, cette raison n’est pas propre à un rêve équestre mais simplement à l’envie d’appartenir à un groupe dans lequel vous vous sentez bien. C’est quelque chose que l’on rencontre plus souvent dans les clubs notamment.

Là encore, il n’y a pas de jugements à émettre car c’est un biais normal que nous avons tous et qui est d’une certaine manière instinctif car nous voulons tous appartenir à un groupe dans lequel nous nous sentirons protégé. Ce n’est pas toujours évident pour tout le monde de se créer sa propre opinion et d’agir selon ses propres principes surtout si cela va à l’inverse de ce que le groupe pense et fait. C’est quelque chose que tout le monde n’est pas capable de faire et qui demande du courage et de savoir dépasser le regard des autres.

C’est aussi pour ça que les mentalités mettent du temps à changer car il reste finalement assez peu de monde pour vraiment s’interroger sur l’utilité de chaque chose et qui refuse simplement de se contenter d’un « parce que c’est comme ça » ou d’un « si t’es pas content tu peux aller voir ailleurs ». A quoi bon se poser cette question si c’est pour finir rejeté et mis à l’écart du groupe ? Clairement, ça ne vaut pas le coup de s’interroger sur le pourquoi du comment pour tout le monde puisque ça rajouterait le douloureux dilemme de devoir choisir entre vos valeurs et le groupe. Donc pour certains, c’est moins douloureux de ne pas interroger ses valeurs.

Ce qu’il faut retenir de tout ça, c’est que quelques soient les outils techniques ou matériels que vous choisissez d’utiliser, il est important que vous sachiez vraiment pourquoi vous les avez choisis en particulier et d’en être conscient.

Il n’y a pas de mauvais outils, il n’y a pas de mauvaises méthodes ni de mauvais choix. Il n’y a que des choix qui correspondent à vos besoins et valeurs. Même si votre besoin actuellement c’est de faire partie d’un groupe davantage que vous interroger sur vos pratiques.

Ce qui est important aujourd’hui c’est d’être conscient de ce choix. En étant pleinement conscient de ça, vous pouvez ressentir dans votre coeur si c’est quelque chose de juste pour vous ou pas. Et effectivement, peut-être que ça l’est oui, mais ça ne veux pas dire que ça le sera toujours. Et si ça ne l’est pas, demandez-vous quelles sont vos valeurs et de quelle manière vous pourriez pratiquer l’équitation qui soit davantage en adéquation avec vos valeurs (ce qui ne veut pas dire que vous ferez ça toute votre vie).

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