Jean-Claude Barry, ancien écuyer au Cadre Noir de Saumur nous explique dans cet ouvrage les détails et subtilité du travail à la main. Le cavalier muni d’une badine, à pied marche à l’épaule de son cheval tout en le tenant par les rênes. Il peut lui faire exécuter ainsi tous les déplacements latéraux et les airs de Haute Ecole. Cette façon de travailler est une alternative au travail aux piliers tel qu’ils étaient utilisés à la fin du XVIIème siècle et qui était trop contraignante pour les chevaux nouvellement importés d’Angleterre : les pur-sangs. Les longues-rênes qui se rapprochent davantage de l’attelage ne sont pas idéales pour résoudre ou vérifier rapidement un problème rencontré en selle.
Le travail en main cumule les avantages du travail monté et ceux du travail à pied :
- Absence du poids du cavalier
- Point de vue externe du cavalier pour apprécier la qualité du mouvement du cheval et éventuellement le corriger
- Meilleure compréhension du cheval (le cavalier peut toucher toutes les parties du corps du cheval pour mieux se faire comprendre)
- Aides du cavalier à pied similaires aux aides du cavalier monté
Le contenu
La première partie du livre est consacré à l’histoire du travail à la main, son utilité, sa mise en oeuvre avec le harnachement et les recommandations relatives à la sécurité du cavalier. Vous trouverez ensuite des informations sur la conduite du cheval et les aides que doit employer le cavalier à pied pour le mener. Comme en longe, le positionnement en arrière de l’épaule doit donner de l’impulsion alors que si le cavalier précède, le cheval doit ralentir. On se rend compte que ce travail est parfaitement codifié avec l’usage de la rêne extérieure pour avancer et la rêne interne pour ralentir ou s’arrêter.
En seconde partie du livre sont abordées les flexions de mâchoire et d’encolure. Elles permettent de décontracter l’encolure et la bouche du cheval mais aussi de contrôler la hauteur de la nuque par l’intermédiaire du mors. Le gros avantage de ces exercices est clairement d’expliquer au cheval, à l’arrêt et dans le calme les réponses attendues aux effets produits par l’intermédiaire des rênes sur le mors. La recherche de décontraction d’abord à l’arrêt par l’intermédiaire des flexions, puis aux 3 allures est une base du travail du cheval selon l’école française. Toutes les résistances du cheval commencent dans la bouche : ce chapitre a donc une importance capitale et ne doit pas être négligé.
La dernière partie du livre est dédiée à la recherche du rassembler. Le travail à la main est quasiment indispensable pour la diagonalisation car le cavalier peut voir et récompenser immédiatement les mouvements les plus justes. La badine utilisée sur les différentes parties du corps du cheval permettra d’améliorer le geste du cheval en vue d’évoluer vers un piaffer. Jean-Claude Barry nous détaille même les différentes zones que le cavalier peut toucher avec la badine et les effets obtenus sur le cheval, par exemple, un toucher au niveau des canons postérieurs permettra une flexion plus importante des jarrets et une élévations des canons postérieurs sous la masse.
Mon avis
C’est un livre relativement facile à lire et tous les procédés mis en oeuvre pour le travail à la main sont bien expliqués. Il y a de nombreuses et grandes photos pour illustrer les textes, ce qui peut donner l’impression qu’il y a finalement peu de contenu écrit. Pourtant les paragraphes sont rédigés de manière très synthétique et assez complète.
A ma grande surprise, les flexions de mâchoire sont exécutées sur le mors de bride or j’avais pourtant toujours vu qu’elles devaient être réalisées plutôt sur le mors de filet, à la fois dans les ouvrages anciens et modernes. Le mors de filet est le décontractant tandis que le mors de bride est l’abaisseur qui aide le cavalier pour la cession de nuque. Visiblement les deux étant possibles, c’est à chacun de voir de quelle façon il choisira de procéder en fonction de son cheval, son rapport avec la main et ses objectifs.
Le chapitre sur la diagonalisation est intéressant mais il manque à mon sens de profondeur. Les seuls procédés mentionnés pour aborder la diagonalisation sont les transitions rapprochées. Il n’est pas fait mention non plus du travail préparatoire au rassembler et des autres procédés qui peuvent aider le cheval à diagonaliser. Il manque également des informations sur le dosage des aides.
Un autre regret aussi, c’est que ce travail ne puisse pas être pratiqué des deux côtés du cheval. La manière dont l’impulsion a été codifiée sur la rêne droite ne permet pas au cavalier de changer de côté. Si jamais une difficulté se présente sur la hanche droite il n’a alors que peu de moyens d’y accéder avec la badine.
Cette lecture s’est malgré tout avérée aussi instructive que surprenante. En partageant son expérience et son savoir-faire, M.Barry m’a permis de me rappeler que l’on ne doit jamais avoir un avis arrêté sur l’efficacité d’un procédé et qu’il est bon parfois de sortir un peu de ces règles que l’on s’impose pour explorer de nouvelles (ou très anciennes) idées.
Cet ouvrage s’adresse clairement à tous les cavaliers intéressés ou juste curieux du travail à la main dans la tradition de l’école française. Bien que cette dernière soit loin d’être parfaitement uniforme, ce livre permettra à qui le veut de commencer à travailler son cheval à la main avec une méthode décrite en détails.
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4 Responses
Merci beaucoup pour toutes vos publications qui m’aide dans mon travail avec mes chevaux.
Bonjour,
Merci tout d’abord pour la lecture attentive de mon livre. Juste des précisions, vous avez raison, en lisant vos commentaires je réalise que j’aurai dû approfondir certaines parties, ou en tout cas préciser les choses. vous m’en donnez l’occasion, j’en suis ravi. En ce qui concerne les flexions sur le mors de bride, chez Fillis, Baucher et autres Kerbrecht, Cette pratique était courante. A cette époque, les chevaux de haute école étaient , lorsqu’ils étaient rassemblés montés directement sur le mors de bride, les rênes de filet souvent détendues sur une encolure très relevée. C’était l’attitude recherchée. Nous en avons hérité à Saumur, c’est pourquoi, comme je l(‘explique en début d’ouvrage nous travaillons les chevaux en bride dans le travail à la main, contrairement aux autres écoles. Toutes les illustrations du début du XXème siècle l’attestent.
Pour ce qui est de la recherche et la préparation du rassembler, j’ai choisi la méthode la plus pratique et la plus « aisée », car mon but était de vulgariser ce travail, de le rendre facile et accessible au plus grand nombre. La méthode proposée est la plus aisée et la plus éprouvée.
Vous avez raison, j’aurai du insister sur le fait que ce travail est réalisable aux deux mains, sans problèmes et qu’il doit être réalisé de façon symétrique donc aux deux mains. il suffit d’inverser les codes sur les rênes. Il n’y a pas de rêne droite ou de gauche, mais intérieure et extérieure. Là aussi, ce sont des raisons pratiques qui m’ont guidé. Les cavaliers étant majoritairement droitiers et les chevaux gauchers, il est plus facile, pour les deux de travailler sur le côté gauche. Vous remarquerez à ce sujet que tous les chevaux présentés dans le travail en main au travail rassemblé, quelques soient les cultures et les écoles le sont à main gauche (Jerez, Vienne, Lisbonne, Saumur) pour ces raisons. Il est à noter que très souvent, les chevaux piaffent mieux à main droite lorsqu’ils sont au mur, c’est pourquoi il est bon pour perfectionner le piaffer, de les travailler à main droite.
Concernant le dosage des aides, il est toujours très difficile d’établir des règles d’emploi, cela dépends de la sensibilité du cheval et de l’expérience du cavalier. Ce qui est sûr, s’il doit y avoir une prédominance, ce sera toujours au profit des aides impulsives et du mouvement en avant. A ce sujet, je me permets de citer un passage de mon dernier ouvrage sur l’équitation française:
« Le tact équestre amène le cavalier à déterminer l’effet à produire, l’intensité de cet effet et le moment exact de son intervention » et plus loin « Je suis persuadé que nous les travaillons trop et trop longtemps de façon générale, mais que nous sommes aussi trop exigeants. Le cheval a des limites physiques et psychologiques qu’il faut évaluer afin de ne pas le blaser, et surtout pour éviter d’aller jusqu’aux résistances, voire aux défenses. Cependant, si un conflit s’engage, il faut pouvoir en sortir vainqueur. C’est pourquoi, il faut être pondéré dans ses demandes et mesuré dans ses exigences pour s’adresser à la compréhension du cheval ; un cheval vaincu n’est jamais convaincu.
Enfin je vous remercie car vous m’avez donné l’envie de compléter mon ouvrage. Salutations équestres, Jean-Claude Barry
Bonjour Monsieur Barry,
C’est un honneur de vous voir commenter ici et je vous remercie pour les précisions que vous apportez à mes questionnements. N’ayant jamais pratiqué le travail à la main, je suis très curieuse des procédés employés pour y parvenir. Mais n’y a-t-il pas un peu de confusion chez le cheval lorsque le cavalier à pied passe du côté droit et inverse donc les codes sur les rênes ? Est-ce que cela demande un certain temps d’apprentissage pour que le cheval comprenne les aides à pieds ou est-ce que c’est au contraire très intuitif ?
En tout cas, je vous lirais avec plaisir, votre dernier livre et peut-être aussi la nouvelle version du travail à la main !
Equestrement,
Bonjour Alexandrine,
Non, il n’y a pas de confusion, c’est juste souvent plus difficile pour le cavalier, car moins naturel pour lui que du côté gauche pour les raisons que j’ai expliquées dans mon précédent mél. Pour le cheval aucune difficulté de compréhension, il suffit , comme le dit l’adage « d’utiliser les mêmes effets pour obtenir les mêmes résultats ». Ce n’est qu’une question de code, et quand le code est bien établit, il fonctionne de façon symétrique sans problèmes.
Pour comprendre les aides à pied, il n’y a aucune difficulté pour le cheval. Le transfert du travail monté au travail à pied est aisé et vice versa. L’intérêt du travail à pied est surtout de préparer et perfectionner celui monté et d’offrir une alternance au quotidien. Concernant l’intuition, quand vous travaillez avec du vivant et de l’intelligence, comme chez le cheval, il y a forcément une part d’intuitif et de kinesthésique. Savoir l’exploiter en vue du but à atteindre est ce que nous appelons le tact équestre
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Salutations équestres,
Jean-Claude Barry